Le stress de Lucas

Dans un atelier d'écriture, je devais choisir un moment fugace marqué par son intensité physique ou émotionnelle. La situation, réelle ou fictive, devait se raconter comme un ralenti de cinéma. Décrire chaque séconde, chaque mouvement et chaque sensation. Dans cette situation, Lucas, le personnage principale, est un lycéen stressé lors d'une évaluation d'espagnol.

Le prof nous demande de préparer la salle pour l’évaluation. Il faut que je me sépare de Mathilde, la meilleure élève d’espagnol. Elle n’a pas de problème, ayant vécu en Espagne, elle maitrise complètement la langue. Je souris, mais en réalité j’ai envie de m’échapper. C’est injuste, honnêtement, l’Éducation nationale devrait nous alléger la charge et supprimer les matières inutiles. Le prof me stress avec ses ordres militaires et les formalités idiotes.

Une fois de plus, je n’ai rien préparé. Je n’y peux rien. Ce n’est pas que je sois un raté. L’espagnol ne rentre pas. Le lycée devrait nous féliciter de savoir dire bonjour dans une autre langue, du moins. Ben, d’accord, je suis nul en anglais, aussi. Mais, cette langue me permet de chanter ou de comprendre quelque chose quand je vais au cinéma. C’est vrai j’exagère, je ne chante pas en anglais. J’aime la musique, mais je ne vois rien dans ma tête. J’entends, mais je ne lis pas les mots dans mon cerveau. Cela ne sert à rien. J’aime m’amuser avec les sons, pas avec les paroles.

Quoi ? Qu’est-ce qu’il a dit ? Chloé me dit que le prof va distribuer l’évaluation, qu’il va  lire à haute voix les consignes et après un temps des questions on pourra commencer. Pouf, c’est toujours la même chose. Je vais sûrement avoir besoin de l’aide. Peu importe ma note, maman veut que je donne le meilleur de moi-même. Allez, Lucas, juste un 5 sur 20. Personne ne me demande d’être un Cervantes.

Comme d’habitude, je suis perdu. Je dois rédiger un texte de 10 lignes pour parler de mes talents afin de participer à un concours. Le prof rêve ou il pense que nous sommes tous de polyglottes. D’abord, je n’ai aucun talent pour écrire, que se soit en français, en anglais ou en espagnol. Oups, j’ai oublié que j’ai en devoir noté en français.

Allez un peu de concentration. Ouais, deux belles lignes en vingt minutes. Je suis crevé. Il est 10h20 et mes tripes réclament un peu d’attention.

Comment on dit : j’ai gagné une compétition d’escrime en espagnol ? Escrime... je pourrais écrire tel quel et puis le prof il verra... Ah, je n’arrive pas à continuer mon texte. Escrime. J’en ai fait, c’est vrai. J’ai été bon. J’aimerais bien retourner chez madame Ouris, elle enseignait très bien et en plus, elle m’aimait bien aussi. J’ai été excellent. Alors, escrime... Alors, peut-être Mathilde pourrait me glisser une piste. Oui, elle sait tout. Et si je lui demande ? Mais, on est en éval, si le prof me surprend en train de demander à Mathilde je risque une punition. Je pourrais dire que je demandais l’heure ou un blanc, pas un mot pour mon texte.  

Je regarde le prof, qui se balade devant la classe de gauche à droite avec un bouquin à la main. Il ne pourra pas m’écouter du fond de la salle. Je vais chuchoter au prochain tour du prof. Merde, Mathilde ne m’entend pas. Je lève ma tête, je fronce les sourcils pour donner l’impression que je cogite. Je ferme un peu mes yeux pour montrer ma concentration.

Il s’est retourné, je demande à Mathilde pour la énième fois : « es-cri-me ». Le prof se retourne quand je suis juste en train de répéter et Mathilde me souffle « esgrima ». Trop tard, il a entendu. Il vient vers moi, me demande ma feuille. Il la retire. J’essaye de lui dire que j’ai demandé un blanc. Il me dit que le blanc est différent de l’escrime. Merde, je suis cuis.

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